2025-08-17 | ![]() ![]() |
On ne mesurera jamais le tort culturel fait par les Khmers rouges à cette région de l’Asie en laissant aussi longtemps à l’abandon ce bijou culturel, voire en en détruisant certaines parties. Aujourd’hui, tout ceci n’est plus qu’un vieux souvenir. Cette région a repris ses quartiers, y compris le centre-ville de Siem Reap, où les bâtiments datant de l’époque coloniale sont encore bien présents malgré une irrépressible expansion touristique. Pour quelques années encore, cette capitale du nord cambodgien vivra au rythme de la reine bicyclette, laquelle peut porter un stère de bois ou quatre passagers adultes à la fois. On croirait voir revivre les personnages des romans d’André Malraux, de Pierre Loti ou de Jean Lartéguy. La touche finale au tableau reste indubitablement le traditionnel chapeau conique porté par une majorité de la population locale.
Difficile de trouver les mots pour décrire ces merveilles de l’art khmer classique qui s’étendent sur plus de 500 km2. Neuf monarchies ont couvert plus de 600 ans de l’histoire cambodgienne, et, parmi les nombreux temples qui s’érigent dans la région, tous ne furent pas construits à la même époque. Certains, par exemple, furent achevés au 9e siècle tandis que les tardifs furent terminés au 15e siècle.
Impossible de visiter tous les temples de la région tant ils sont nombreux et tous, d’ailleurs, ne sont pas accessibles. Disons que les principaux sont Angkor Vat, Angkor Thom, Ta Prohm Bayon Banteay Srey, Preah Khan Pre Rup, Baphuon. A lui seul, Angkor Vat, le temple des temples, est majestueux, depuis les douves et le portail d’entrée aux quatre enceintes qui le composent. Comme beaucoup d’autres sites archéologiques de la région, Angkor Vat se distingue par la variété infinie de ses bas-reliefs mettant en scène de divines créatures féminines, évocatrices du paradis sensuel des dieux-rois, des scènes de guerres mythologiques khmers entre singes et démons, et d’intéressantes scènes informant sur la vie courante au 13e siècle. Parmi les nombreux autres temples, on retiendra le petit bijou qu’est celui de Banteay Srey, perdu dans la jungle et découvert par un lieutenant français en 1914.
D’autres musts sont le Ta Prohm sur les murs croulants duquel les arbres ont plongé leurs racines depuis des siècles; le temple de Bayon au centre d’Angkor Thom, renommé mondialement pour ses 50 chapelles surmontées de 200 visages géants; la terrasse du temple Baphuon (construit en 1060), dont les bas-reliefs représentent des éléphants et des figurines multicolores, selon les différentes teintes de la pierre. Un peu partout, la touche orange des bonzes ponctuent l’image typique, de même que les multiples statues de Bouddha ornées d’offrandes comme, par exemple, des colliers de fleurs.
Au moindre rayon de soleil, le paysage rural des environs de Siem Reap s’égaye. S’ils représentent des tâches ingrates, les travaux des champs offrent des images très pittoresques comme, par exemple, un paysan guidant sa charrue tractée par un buffle dans un champ boueux et, à côté, un quatuor de paysannes coiffées du traditionnel chapeau conique, dit tonkinois, occupées au travail pénible du repiquage du riz.
Ce spectacle se répète un peu partout dans la campagne environnante avec, comme toile de fond, des cahutes en feuilles de cocotiers, des bovins à bosse pour tirer un soc de charrue et, courant partout, des bandes de porcs nains.
C’est un spectacle multicolore tout aussi enchanteur qui se présente lors de la traversée en bateau des villages flottants de cette immense étendue d’eau qu’est le lac de Tonlé Sap, surnommé la mer Intérieure. Gonflée par les eaux du Mékong, sa superficie peut varier de 2500 km2 par temps sec à 12 000 km2 en période de crue pendant la mousson. Ces villages flottants ont beaucoup de caractère, avec les barques qui servent à tous les transports. On y croise aussi bien des embarcations chargées de poissons, de fruits ou de légumes que des cuisines ambulantes, de gamins en uniforme se dirigeant vers leur école, etc. Les habitations flottantes peuvent être des jonques ou des radeaux surélevés de quatre cloisons et d’un toit, maison éphémère qui peut être aisément déplacée d’un endroit à un autre, tirée par une barque à moteur, ou encore des house-boats dans le genre de ceux qu’on trouve sur les backwaters du Kerala (Inde).
Certaines de ces habitations font un commerce intensif d’élevage de poissons, fournitures essentielles pour la fabrication du nuoc mâm.
Texte et photos : Gérard Blanc
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